ELIZABETH CZERCZUK ET SES AVATARS
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Aux sources de l’inspiration
Originaire de Wrocław, en Pologne, Elizabeth Czerczuk baigne dès sa jeunesse dans l’ambiance théâtrale de deux personnalités de la ville: Jerzy Grotowski et Henryk Tomaszewski, figures majeures de la scène polonaise. Déjà en tant que lycéenne, elle participe aux travaux du Théâtre Laboratoire de Jerzy Grotowski, bénéficiant de l’enseignement de Ryszard Cieślak (travail corporel) et de Zygmunt Molik (travail vocal).
L’enseignement de ces grands comédiens lui permet de trouver sa vocation d’artiste. Par conséquent, après son bac en 1984, elle abandonne le projet d’études de médecine et entre au prestigieux Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Pologne à Cracovie. Ce qui lui reste de ses projets d’études médicales, c’est le crâne didactique offert par son père. Il lui servira plus tard comme crâne de Jochanaan, dans la pièce d’Oscar Wilde «Salomé». Pendant ses études à Cracovie, alors fief de Tadeusz Kantor, maître du théâtre de la mort d’inspiration dadaïste, Elizabeth se rapproche de lui à la fois au Conservatoire et au Théâtre Cricot 2.
Elle sera marquée à jamais par son univers artistique. En 1991, après ses études à Cracovie, Elizabeth Czerczuk bénéficie d’une bourse d’une année accordée par le gouvernement français et entre au Conservatoire national supérieur d’art dramatique à Paris, pour y suivre l’enseignement de Daniel Mesguich, Philippe Adrien et Jean-Pierre Vincent. Elle s’enrichit aussi artistiquement par la technique de Marcel Marceau, transmise par le célèbre mime dans son école, à quelques pas du Conservatoire.
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Tous les chemins mènent à Paris
À Paris commence pour elle une carrière internationale. Elle exerce ses différents talents en France, à la Comédie-Française, au Théâtre de la Ville, à Paris, et au Centre chorégraphique national de Caen, mais aussi dans de nombreux théâtres de divers pays européens. En Pologne, elle interprète des rôles dans les spectacles, dirigée par des metteurs en scène tels Jerzy Stuhr, ou Marek Koterski. Sous la direction de Zofia Kalińska, collaboratrice de T. Kantor, elle joue le rôle principal dans la pièce «Les Femmes démoniaques», réalisée à Nottingham (Angleterre) et présentée aussi au Théâtre Stary à Cracovie.
Au Conservatoire, à Paris, elle incarne Salomé (rôle-titre de la pièce d’Oscar Wilde) dans un spectacle de fin d’études, sous la direction de Daniel Mesguich, accompagnée de son crâne fétiche devenu, selon la terminologie kantorienne, «sur-objet».
Le rôle donne par la suite naissance à une vraie création de «Salomé» au théâtre de Nesle (Paris). Ici, le crâne fétiche devient la tête de Jean-Baptiste. Son professeur reste toujours près d’elle en tant que conseiller à la mise en scène. Ce spectacle est présenté dans de nombreux festivals internationaux (France, Pologne, Allemagne, Russie, Suisse, Portugal, Ukraine…). Elizabeth Czerczuk travaille toujours avec Daniel Mesguich, cette fois à la Comédie-Française, en l’assistant dans sa mise en scène de deux pièces de Racine («Andromaque» et «Mithridate»).
Elle continue aussi ses recherches personnelles sur l’expression corporelle dans le jeu d’acteur. Celles-là l’amènent à travailler avec des metteurs en scène et chorégraphes tels que Hassan Kouyaté, l’assistant de Peter Brook (Lausanne, Scène nationale Watteau à Nogent-sur-Marne), Philippe Genty à Paris, Henryk Tomaszewski à Wrocław, et Karine Saporta avec laquelle elle collabore au Centre chorégraphique national de Caen.
Sous la direction de Karine Saporta, elle interprète, pendant la saison 1994/1995, le rôle d’Edwige dans «Le Canard sauvage» d’Ibsen, créé conjointement avec le ballet d’Oslo. Le spectacle est joué dans des festivals prestigieux de danse à Copenhague, Bergen, Oslo, et ensuite à Paris, au Théâtre de la Ville. En 2004, elle assiste Karine Saporta dans la mise en scène du spectacle sur la vie de Colette «Feu sur le music-hall», réalisé et présenté à la Comédie-Française.
Karine Saporta lui confie aussi la direction de la promotion et de la diffusion de sa compagnie. Sa nouvelle mission consiste à développer ses activités en Pologne et au Japon. À la suite du succès du projet pendant le festival international de danse Malta à Poznań (2007), se forme un partenariat avec Ewa Wycichowska, la directrice du Théâtre de danse contemporain dans cette ville.
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En 1992, Elizabeth fonde sa première compagnie, la «Compagnie Salomé», qui deviendra plus tard la «Compagnie Elizabeth Czerczuk». Elle crée des spectacles d’auteur. Elle met en pratique sa conception personnelle d’un art total où la dimension corporelle prime d’autres facteurs scéniques.
Ses créations nouvelles résultant de ses recherches esthétiques sont présentées sur de nombreuses scènes nationales et lors de festivals internationaux (dont celui d’Avignon, dans le cadre d’«Europe de l’Est», et le Festival de danse «Les Hivernales», Festival du théâtre à Saint-Pétersbourg, Festival «Eurodrame» à l’Opéra de Leipzig…).
Toujours partagée entre la Pologne et la France, elle a l’ambition, par le biais de ses multiples travaux, de cultiver à la fois ses racines culturelles et les connaissances acquises à Paris. L’objectif de ses démarches consiste à allier le côté perfectionniste de la technique artistique française à l’émotion romantique de sa sensibilité polonaise.
Ses spectacles sont souvent dictés par la voix de grands auteurs polonais, comme «Le Cri d’Ophélie», basé sur «L’Étude sur Hamlet» de St. Wyspiański, ou «Matka», d’après St. I. Witkiewicz. En 1998, à l’occasion du bicentenaire de la naissance d’Adam Mickiewicz, elle lui rend hommage en montant, pour la première fois en France, «Les Aïeux», sous l’égide du Collège de France.
Ensuite, pour le centenaire de la naissance de Tadeusz Kantor, en 2015, elle met en scène «Le Banc de l’école». La même année, elle se consacre à la création du «Cri d’Yvonne», inspiré d’«Yvonne, princesse de Bourgogne» de Witold Gombrowicz (son spectacle est joué notamment en décembre 2015 au Théâtre de l’Aquarium, à la Cartoucherie de Vincennes, dans le cadre du festival 12×12).
Elizabeth Czerczuk, une artiste à facettes
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Depuis 1992, Elizabeth développe en parallèle des activités pédagogiques. Professeure à l’École nationale supérieure de théâtre de Cracovie et de Varsovie, elle enseigne, en alternance, à Paris, à l’École internationale de création audiovisuelle et de réalisation (EICAR), au Théâtre Gérard Philippe et au Théâtre national de Chaillot.
En 2002, après la mort de Henryk Tomaszewski, fondateur du Théâtre de Pantomime à Wrocław, elle est nommée sa première directrice générale et artistique. Pendant cette période à Wrocław (2002-2004), elle réalise un grand spectacle avec 40 artistes (comédiens, mimes, danseurs), inspiré des parties II et IV des «Aïeux» d’A. Mickiewicz, avec une musique originale de Bogusław Schaeffer.
En hommage à Henryk Tomaszewski, Elizabeth crée un Centre d’archives et de documentation. De 2010 à 2012, elle est l’auteure, et la directrice générale et artistique, du projet «Homme@Home, l’Homme face aux éléments», conçu, avec le soutien de la Commission européenne, à travers le programme «Culture 2007-2013». L’objectif est de s’interroger, avec des artistes, metteurs en scène, chorégraphes ainsi que des philosophes, sociologues, anthropologues provenant de France, de Pologne, de Belgique et de Grèce, sur les menaces écologiques subies par l’homme aujourd’hui.
Le projet vise à fusionner tous les domaines d’expression artistique: danse, théâtre, musique, peinture, cinéma, scénographie, mais aussi nouvelles technologies. Dans le cadre de ce projet, cinq créations théâtrales correspondant aux cinq éléments sont réalisées par cinq chorégraphes, notamment Carolyn Carlson et Karine Saporta. Elizabeth Czerczuk, pour sa part, met en scène la création «Carnaval» – l’homme face aux éléments. Celle-ci est présentée au Théâtre Nowy à Łódź, en Pologne. Ce projet européen est enrichi par des séminaires, des conférences et des débats.
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